mercredi 25 novembre 2009

Des ânes du Poitou - soldats en Inde.










L'Inde vient d'acheter trois baudets du Poitou pour renforcer

son armée à la frontière chinoise



Et l'on compatira d'abord avec les concepteurs du Rafale. Car tandis que ces brillants esprits peinent toujours à faire voler la bête au-delà de la ligne bleue des Vosges, voilà que nos éleveurs d'ânes leur font la nique depuis le fin fond des Charentes. Il y a quelques jours, trois baudets du Poitou ont ainsi enfilé l'uniforme de l'armée indienne avec l'ordre de monter au front et la croupe des 10 000 mules équipant encore la quatrième force militaire du monde.
Artillerie et saillies
Au terme d'un laborieux appel d'offres européen, l'état-major de New Delhi a donc préféré ce rustique bourricot au museau et à la barbe de ses cousins belges ou catalans. Prié d'honorer quelque 360 juments autrichiennes, le vigoureux soldat du Poitou devrait notamment renforcer l'artillerie à la frontière chinoise. « Mi-septembre, nous avons reçu un coup de fil pour nous dire que c'était urgent, et qu'un haut gradé était prêt à se déplacer rapidement à l'asinerie de Dampierre-sur-Boutonne » (Charente-Maritime), n'en revient toujours pas Aurélie Lecampion, responsable de l'Unité de sélection et promotion des races mulassières du Poitou (Upra). « Ils en voulaient des dizaines, mais n'oublions pas que cette race d'ânes, la plus vieille de France, a bien failli disparaître. En 1977, seuls 77 individus survivaient encore. »
Accompagné d'un vétérinaire particulièrement tatillon lorsqu'il s'est agi de tâter les chicots et les attributs des dix mâles sélectionnés, l'officier indien s'est alors transformé en véritable sergent-recruteur. « Des minutes confuses. Par chance, l'asinerie disposait d'une ânesse en chaleur afin de prélever des échantillons de sperme. Mais j'avais plus de chances de gagner au loto que de leur vendre mon baudet », raconte l'éleveur Régis Léau. L'anatomie zélée de Sultan de l'île de Ré lui a pourtant depuis rapporté 3 500 euros. « Mais ne me faites quand même pas passer pour un marchand d'armes », plaide aussi celui qui réservait jusqu'alors ses ânes aux cartes postales plutôt qu'à celles des états-majors.
Robuste et peu gourmand
Pourtant, le juteux contrat avait bien failli capoter dès que la délégation indienne eut aperçu cette robe de dreadlocks donnant à l'âne poitevin l'allure d'un fumeur jamaïquain. « Des poils en guenilles, une frange sur les yeux, les Indiens ont trouvé ça si repoussant qu'ils nous ont demandé de les raser », confirme Aurélie Lecampion. « Il a fallu leur expliquer que c'était la tradition, et qu'on n'enlèverait les poils que s'ils achetaient l'animal. » Ainsi, Sultan, Raballus de l'Étoile et Soprano du Magnon ont-ils été tondus avant même la guerre. Mais hormis ce handicap pileux, à la fin du mois d'octobre, les trois baudets du Poitou ont donc officiellement été incorporés dans une armée indienne d'autant plus sous le charme que ces robustes soldats ont aussi l'avantage d'abattre plus de boulot pour deux fois moins de foin que leurs collègues chevaux. « L'espérance de vie est aussi bien plus longue. D'ailleurs, les militaires nous ont assuré qu'un baudet du Poitou âgé de plus de 25 ans vivait toujours chez eux. »
On ne saurait donc trop conseiller aux Dassault et autres Lagardère de miser sans tarder sur la poule de Marans et l'oie du Périgord, sans doute les futurs drones des armées du XXIe siècle.
Auteur : sylvain cottin

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